Ils boivent à l’œil !
Un nouveau phénomène a fait son entrée dans les campus, le ‘’eyeballing’’. Parce qu’ils pensent que l’ivresse est plus rapide, de plus en plus de jeunes boivent de l’alcool par l’œil.
‘’Boire à l’œil’’, une expression vieille comme le monde mais que les jeunes anglo-saxons ont décidé de revisiter. Il ne s’agit plus de boire gratuitement, mais bien de boire par l’orifice de l’œil. Boire de l’alcool fort qui plus est, de la vodka principalement. Cette pratique a été baptisée ‘’eyeballing’’.
Le phénomène est né il y a une dizaine d’années dans les campus américains et est désormais très répandu dans les universités britanniques. Les jeunes Français commencent à s’y adonner aussi, mais le phénomène est encore mal connu.
Les adeptes de cette pratique affirment être saouls plus rapidement en buvant par l’œil. Selon eux, l’alcool passerait de la muqueuse directement aux vaisseaux sanguins se trouvant autour des globes oculaires.
Une idée que rejettent les médecins des deux côtés de la Manche. Les docteurs Professor Robin Touquet, urgentiste à l’hôpital Saint Mary de Londres, et Jean-Antoine Bernard, directeur scientifique de la Société française d'Ophtalmologie, respectivement interrogés par le Daily mail et Metro France, tiennent le même discours. Cette sensation d’ivresse immédiate n’est due qu’à un simple fait : les jeunes sont d’ors et déjà largement alcoolisés lorsqu’ils s’essaient au shoot oculaire ''car il faut être d'une certaine manière anesthésié pour pouvoir supporter la douleur'', précise le Dr Bernard.
''Un alcool à minimum 40% pur comme la vodka versé dans l’œil créé une inflammation et une thrombose – la coagulation des vaisseaux sanguins – ce qui signifie que seule une très petite quantité d’alcool peut être absorbée, explique le docteur Touquet. Contrairement à l’estomac, l’œil n’a pas de muqueuse gastrique qui le protège tout en l’aidant à absorber. Ceci est hautement toxique (…) et cause de sérieux dommages à la cornée et au blanc de l’œil''.
Le Daily Mail a notamment recueilli le témoignage d’une jeune fille de 22 ans, Mélissa, qui vit aujourd’hui avec ‘’une douleur constante’’ à son œil qui coule en permanence. Les médecins lui ont appris que sa vue baisserait et qu’il n’est pas impossible qu’elle perdre l’usage de son œil gauche, celui qu’elle utilisait pour boire.
Melissa vient d’une famille sans difficultés particulières, mais lorsqu’elle est arrivée à l’Université la ''pression'' était si grande, et la ''compétition'' si difficile à gérer qu’elle a commencé à boire plus que de raison. Rapidement, elle a essayé le ‘’eyeballing’’. ''Je voyais des étudiants respectés, intelligents, venant de familles normales, comme la mienne, faire cela. Je sais bien qu’aujourd’hui ça à l’air ridicule, mais tout ça me donnait l’impression que c’était normal''. Selon la jeune fille ''la douleur faisait partie du jeu. C’était un test d’endurance qu’il fallait endurer devant les autres''. Mélissa dit s’être ''habituée à la douleur'' mais est ''terrifiée à l’idée que (l’état de son œil gauche) puisse empirer''.
Pour l’instant le phénomène reste peu connu, mais il préoccupe les autorités britanniques au même titre que le ‘’binge drinking’’. Seuls sept personnes avaient choisi d'apprécier ('like') le groupe facebook, ‘’Vodka eyeballing’’, selon les résultats affichés le 8 octobre 2010. En revanche, il y a des dizaines de vidéos de ces ‘exploits’ visibles sur le site de partage ‘’Youtube’’. Sans parler d’extraits du film d’Ed Bye, ‘’Kevin et Perry’’ (2000) dans lesquels ont voit l’acteur Harry Enfield interpréter un hurluberlu, DJ Eyeball Paul, boire de la vodka avec son œil.
Dans toutes ces vidéos, ce qui, pardonnez l’expression, saute aux yeux avant tout, c’est la douleur du ‘’eyeballer’’. Ses rires ne surviennent que lorsque, après de longues secondes, il ôte sa tête d’entre ses mains pour regarder ses camarades enjoués avec le seul œil qu’il parvient encore à ouvrir.
mbillon@france24.com
© Photos, Droits réservés
0 Comments
Poster un nouveau commentaire