Bataille à coup de chants de Noël et Christmas ca(sse)roles !

Londres et les alentours sont paralysés par les chutes de neige. Les vacances gâchées de millions de personnes, ce n’est pas vraiment drôle. Mais puisque les quotidiens british y mouillent l’orteil s’en aller jusqu’au bout, on leur emboîte le pas, on les pousse dans l’eau (glacée). Attention, humour plus lourd qu’un A 320!

Les journaux britanniques se livrent à une joyeuse bataille de chants de Noël au-dessus des pauvres vacanciers coincés dans les gares et les aéroports. Les quotidiens rivalisent de citations de comptines traditionnelles en première page de leurs éditions dédiées au chaos provoqué par les intempéries. Puisque les médias ne sont pas des personnes physiques, ils ne peuvent pas se livrer des batailles de boules de neige ! Rien d'étrange donc à ce qu'ils se battent à coup de chants de Noël. Et il suffit d’un peu d’imagination pour accuser les tendances politiques des deux journaux qui s’adonnent à cette guerre d’être les déclencheurs de ces douces batailles.

 

Le premier à déclencher les hostilités était le Daily Telegraph, lundi, en titrant ‘’No comfort, no joy’’, déformant ainsi les paroles de ‘’God rest ye merry gentleman’’. Mardi, The Independent a répliqué avec un dubitatif ‘’So this is Christmas’’ singeant la chanson éponyme.


Aucun des quotidiens n’a poussé l’exercice plus loin. Pour éviter l’abus d’humour peut-être. Mais, c’est Noël, alors ne gâchons pas notre plaisir et regardons de plus près les paroles de ‘’God rest ye merry gentleman’’.


Each other now embrace

 

La dernière stance conclue le chant ainsi ‘’And with true love and brotherhood / Each other now embrace ; / This holy tide of Christmas / All other doth deface. / O tidings of comfort and joy / Comfort and joy/ O tidings of comfort and joy’’. Les passagers bloqués à Heathrow seront effectivement bien obligés de se donner la paix du Christ. Depuis vendredi, certains dorment à même le sol de l’aéroport, serrés comme des sardines dans une chaussette accrochée à la cheminée. Les embrassades ne sont peut-être pas chaleureuses, mais dans la promiscuité, il faut bien se soutenir (And with true love and brotherhood / Each other now embrace).


Quand aux marrées de confort et de joie, on l’a bien compris, il faudra attendre l’an prochain. Cette année, il faut se contenter des marrées humaines dans les salles d’attente. Et ce sont bien ces marées boueuses qui engouffrent toutes celles qui devaient faire la beauté de Noël, justement celles de confort et de joie (This holy tide of Christmas / All other doth deface).


The yellow and red ones

 

Pour ‘’So this is Chistmas’’, le sous-titre ‘’War is over’’, n’aurait pas pu être plus inexacte. C’est bien la guerre des remboursements et les bagarres dans les files d’attentes que promet la belle neige blanche. ‘’And so this is Christmas / I hope you have fun/ The near and the dear one/ The old and the young’’. Pas vraiment de place pour l’amusement et ‘’I hope you have fun’’ doit sonner étrangement sarcastique aux oreilles des pauvres vacanciers frustrés qui ne pourront pas être avec ceux qu’ils aiment, mais doivent se contenter des inconnus – de tout âge – qui sont dans la même galère. (The near and the dear one/ The old and the young).


Mais la comptine, en remet quand même une couche : ‘’ For yellow and red ones, Let's stop all the fight / A very merry Christmas / And a happy New Year’’. Les rouges de colères et ceux qui rient jaunes doivent effectivement se compter pas centaines. Et ce n’est pas fini. Heathrow a prévenu que les perturbations pourraient se prolonger après Noël. Alors bonne année grand-mère !


Lundi, The Independent a peut-être même vu passer le père fouettard. En titrant ‘’Grounded’’, un jeu de mot pour dire à la fois ‘’cloués au sol’’ et ‘’punits’’, le quotidien insinue peut-être que les Britanniques n’ont pas été bien sages cette année. En lieu et place des cadeaux, ils reçoivent donc une punition.


Heureusement que le Père Noêl à sa propre compagnie aérienne – Traineaux Airways – sinon, même les gentils enfants aurait été privés de leurs sucres d’orge.

 

Here comes the Grinch

 

Mais au milieu de toute cette bonne humeur, il fallait bien que le Grinch fasse son apparition. Il a choisi de s’exprimer dans The Times sous la plume de Roger Boyes. ‘’Vous pouvez lire le calendrier à l’envers, cette semaine est et restera en hiver.’’ Boyles dénonce ainsi le manque de préparation de Heathrow. ‘’Jadis l’aéroport le plus emprunté du monde, il est aujourd’hui le plus en colère’’. Et The Independent en remet une couche. L’aéroport était autrefois au cœur du monde développé occidental, aujourd’hui, ‘’il a l’allure d’un pays du tiers monde’’ selon le mot de Secrétaire d’Etat aux transport, Lord Adonis.

 

Mais les chants de Noël et les bons mots ne suffiront pas à apaiser le demi million de personnes qui reste coincée dans les aéroports. Même pas ceux qui, d’ordinaire, ce seraient rabattus sur l’Eurostar, puisque le train, lui aussi, est en perte de vitesse et accuse des retards extravagants.


Les pauvres passagers ne pourront même se consoler en regardant - une larme d’espoir dégoulinant sur une joue frigorifiée - les agents saler les pistes d’avion ! On en a assez de tout ce blanc, ce blanc et encore ce blanc et cette nouvelle couche de sel blanc ! Le sel pourrait au moins avoir la décence de ne pas être blanc !

 

 

 

 

 

marie.billon@gmail.com

 

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