Les Britanniques sont furieux contre Barack Obama. Le Président des Etats-Unis a qualifié la France de ‘’meilleur ami’’ des Américains. Un titre que les Britanniques pensaient détenir ad vitam aeternam.

Les Britanniques piétinent violemment le sol et crient frénétiquement ‘’Et nous ? Et nous ? Et nous ?’’, ‘’C’est pas juste ! C’est pas juste ! Et c’est pas juste’’. Pourquoi un tel énervement puéril ? Parce que Barack Obama a ‘’défait la paix’’ (comme on dit en cour de récréation) aux British. Ou plus exactement parce que les Etats-Unis auraient changé de meilleur ami. Exit la ‘’relation spéciale’’ que le Royaume-Uni et les Etats-Unis sont censés entretenir depuis que Winston Churchill l’a ainsi qualifié en 1946.

‘’Nous n'avons pas de meilleur ami ni de plus fort allié que Nicolas Sarkozy, et le peuple français’’, a déclaré Barack Obama lors de la visite du Président français aux Etats-Unis en début de semaine. Une phrase qui a profondément choqué et attristé les Britanniques.

‘’Dire que Paris, et non pas Londres, est le plus grand allié de Washington est tout simplement ridicule. Une telle remarque est non seulement fausse mais insultante pour la Grande-Bretagne’’, estime Nile Gardiner, directeur du Margaret Thatcher-Centre pour la liberté, basé aux Etats-Unis. Michael White sur son blog du Guardian, poursuit la même idée. Dire que ‘’Sarko, un populiste de droite’’ est le meilleur aillé des Américains ''est manifestement stupide’’. Mais pour le Daily Mirror, c’est cependant une ‘’rebuffade’’ pour David Cameron.

Lafayette, sage femme de l’indépendance américaine

Cette déclaration a eu l’effet d’une nouvelle Tea Party (au sens historique, pas au sens politique) pour les Britanniques. Quels ingrats ces Américains ! Qui a sacrifié le plus de soldats en Afghanistan aux côtés des Américains, demande le Daily Miror ? 349 soldats britanniques sont morts depuis le début du conflit, deux fois plus que de soldats français. Et pour cause, 10 000 britanniques sont positionnées en Afghanistan contre 3850 français.

L’amitié à échelle internationale se mesure-t-elle au nombre de morts ? Pas seulement. Elle se juge aussi sur le passé. Et c’est là que le bas blesse. Ce sont les Français, avec le marquis de Lafayette, qui ont aidé les colons américains à se défaire du joug anglais rappelle John Litchfield, correspondant de The Independent à Paris. ‘’Si Georges Washington est le père l’Amérique, Lafayette est sa sage-femme’’, écrit-il.

Les relations franco-américaines sont depuis longtemps ‘’fraternelles’’ écrit-il encore. Pour preuve la statue de liberté offerte par les Français en 1886. Fraternelles donc, sauf durant la période de Gaulle, le général se méfiant du géant américain faisant de l’ombre à l’Hexagone. Sauf aussi, depuis 2003, quand Jacques Chirac et Dominique de Villepin ont dit non à l’intervention en Irak.

Sarkozy l’Américain

Mais ‘’Sarkozy l’Américain’’ s’est employé à recoller les morceaux. Il a fait revenir la France dans le commandement intégré de l’OTAN dont de Gaulle l’avait fait sortir en 1966. Et il s’est toujours bien entendu avec Georges W. Bush. Mais sa relation avec Barack Obama n’a pas démarré du bon pied.

En novembre 2008, avant l’élection de Barack Obama, Nicolas Sarkozy aurait dit, selon Frantz-Olivier Giesbert : "Si John McCain est élu, je pourrais continuer à exister, mais si c'est Barack Obama, ce sera plus dur, ce sera lui le taulier du monde". Le ‘’Barack Obama, c'est mon copain", lancé la même année n’a pas pu rattraper les choses.

Depuis le début de son mandat, Barack Obama semble se faire un plaisir de rabattre son caquet au président français. Il a notamment largement ignoré son homologue au G20 d’avril 2009. Le président des Etats-Unis avait d’ailleurs réservé sa première visite européenne à Gordon Brown, l’ancien premier ministre britannique. Une décision qui a blessé l’égo français mais que les Britanniques ont vu comme naturelle puisque ce sont eux les meilleurs amis des Américains, n’est-ce pas ?

''Langage diplomatique''

Barack Obama changerait-il d’ami comme de chemise ? Non, ‘’c’est du langage diplomatique’’, estime John Lichfield. ‘’Monsieur Obama a dit de la France ‘nous n’avons pas d’ami plus grand’, il n’a pas dit ‘la France est notre plus grand ami’’. Apparemment, pour le correspondant, ce n’est pas blanc bonnet et bonnet blanc. Non, selon lui ‘’Le président Obama a placé la France en première ligue (…) dans le classement des amis des Américains. Vous Français, êtes dans la liste du haut (…) aux côtés – et pas nécessairement avant – le Canada, le Japon, l’Allemagne, la Belgique, le Luxembourg et la Grande-Bretagne’’.

Micheal White du Guardian s’accorde avec John Litchfield sur ce point : ‘’Remplacer ‘Sarkozy’ et ‘Français’ [dans la déclaration d’Obama] par ‘Merkel’ ou’Argentine’, et la phrase marche tout aussi bien. En gros, ça ne veut rien dire’’. White, qui a dédié tout un poste à rassurer les Britanniques, finit son texte en se moquant du sentiment d'insécurité – encore une fois – infantile de ses concitoyens en concluant : ‘’sans rancune, papa nous aime toujours’’.
 

Si cette remarque de Barack Obama était diplomatique elle manquait certainement de diplomatie aux yeux des Britanniques. Mais peut-être ne devraient-ils pas oublier que le président américain avait qualifié les relations des Etats-Unis avec la Grande-Bretagne de ‘’vraiment spéciales’’ et ‘’essentielles’’ en juillet dernier. A moins que ce ne soit, ici encore, du ‘’langage diplomatique’’.

Marie.billon@gmail.com

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