Les Lords travaillistes font de l’obstruction parlementaire. Pour faire échouer le référendum sur la réforme du scrutin prévu le 5 mai prochain, les pairs font des discours interminables sans aucun rapport avec le débat.

Plusieurs dizaines de Lords ont dormi à Westminster la nuit de lundi à mardi. Certains ont même entamé leur sommeil dans l'hémicycle pour le finir sur des lits camps mis à leur disposition par le personnel du parlement.

Pourquoi ? Ce n'était pas une pyjama-party gigantesque, ni une volonté massive de fuir son conjoint en début de semaine, mais de l’obstruction parlementaire à grande échelle ! Du Filiburstering au sommet de son art de la part de Lord travaillistes dont Lord Kinnock, l'ancien chef du Labour ou Lord Falconner, l'ancien ministre des Finances. Ils protestent contre la reforme du scrutin qui devrait être soumis à referendum le 5 mai prochain.

Celle la même qu’Ed Miliband soutient, oui!

Celle la même qui modifierait la manière dont les membres des Communes - donc pas les Lords puisqu’ils sont nommés – sont élus, oui !

Cannibalisme

Ce n'est pas très logique, n'est-ce pas? Certainement pas moins que de parler de cannibalisme, de chanter les louanges de Facebook ou de s’émerveiller des nombres premiers en plein débat parlementaire comme certains Lords l'ont fait lundi soir!

C'est bien sûr pour bloquer aussi longtemps que possible l'élaboration du texte que les Lords ont fait de telles mises en abîme. Car pour que le référendum puisse se tenir le 5 mai prochain, il faut que la loi soit rédigée d’ici le 16 février.

Si les Lords travaillistes s'en prennent à ce projet ce n'est pas pour signifier que la Chambre haute peut encore narguer la Chambre basse, c'est parce que le Labour a beau soutenir la reforme du mode de scrutin, elle rejette la réduction du nombre des Communes de 650 a 600 parlementaires, estimant que cela donnerait lieu à un nouveau découpage des circonscriptions au profit des conservateurs.

"Je supporte le referendum sur le mode de scrutin (…). Mais je ne soutiens pas la tentative des conservateurs de le combiner avec des petites manigances affectant toutes les circonscription de ce pays", explique Ed Miliband.
Mais les conservateurs et libéraux-démocrates estiment que les Lords travaillistes font du déni de démocratie. Pour Nick Clegg, ‘’une bande de dinosaures travaillistes à la Chambre des Lords essaient d’empêcher les Britanniques de se prononcer sur la manière dont ils élisent leurs représentants’’.

Vous avez omis d’amener vos dés avec vous ?

En attendant, les Lords n’ont pas peur de sacrifier leur sommeil pour une cause qu’ils estiment juste. Ils font même le contraire de la grève du zèle. Ils ont, en tout, 126 amendements à étudier. Et alors qu’un amendement donne habituellement lieu à environ 30 minutes de débat, lundi, les Lords ont mis 22 heures à en étudier trois !

Westminster s’est donc plié en quatre pour garder les pairs motivés et en bonne santé. ‘’Nous mettrons à votre disposition de quoi vous restaurer et des amusements. (…) Vous vous ennuyez ? Nous mettons à votre disposition des jeux de société. Vous jouez au bridge ? Mais vous avez omis d’amener vos dés avec vous ? Emprunter ceux qui vous plairont’’, explique une circulaire composée pour l’occasion.

A une heure moins dix, dans la nuit de lundi à mardi, la récréation a donc sonné. Certains ont veillé tard pour jouer ou s’accouder au Bishop’s bar gardé ouvert toute la nuit exceptionnellement. D’autres ont dormi sur les lits de camps disposés dans des endroits séparés pour les hommes et les femmes.

Record de longévité

Cette situation aurait pu durer longtemps si l’appel du porte-monnaie n’avait pas sonné. Car les Lords sont payés à la séance, environ £200. Même si une séance dure une semaine entière, elle toujours sera payée comme un seul jour de travail. Les Lords ont donc accepté, mardi midi, de s’attaquer aux questions du jour.

Mais cela ne signifie pas qu’ils abandonnent leur filibustering sur ce projet de loi. Le personnel de Westminster va donc devoir faire preuve de beaucoup d’imagination pour garder les Lords gaillards et concentrés, mais aussi pour éviter que ne se multiplient les photos sur lesquelles on peut voir les pairs s’endormir lourdement sur les bancs. Surtout si les Lords veulent battre leur propre record de longévité de 30 heures de débat d’affilées.

marie.billon@gmail.com

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