Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur ‘’Margaret Thatcher’’, par Jean-Louis Thiériot
Il existe peu de livres écrits en français sur Margaret Thatcher. Pourtant, de ce côté de la Manche aussi, tout le monde connaît la Dame de fer. Le livre éponyme de Jean-Louis Thiériot est donc bienvenu pour briser les mythes gravitant autour l’unique occupante de 10 Downing, Street, et nous éclairer sur sa personnalité et sa politique.
Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur Margaret Thatcher sans jamais oser le demander… et sans jamais le trouver d’un ouvrage francophone. Jean-Louis Thiériot livre, dans son ‘’Margaret Thatcher’’, un portrait complet – ou vraiment tout presque - de la seule femme qui a jamais occupé le 10 Downing Street.
Au-delà de la Dame de Fer, l’auteur essaie de faire comprendre la psychologie, la politique et les actions de Lady Thatcher aux Français qui ne retiennent souvent que ses mauvais cotés. Demandez à la plupart des Hexagonaux ce qu’elle leur inspire, ils vous diront que c’était une femme dure et eurosceptique au possible. C’est qu’elle ne s’est jamais vraiment entendue avec les présidents français qu’elle a côtoyés, Valéry Giscard d’Estaing et François Mitterrand.
Mais de l’autre côté de la Manche non plus, elle n’a pas laissé un fameux souvenir, se retirant sur l’échec cuisant de son projet d’impôt local, la PollTax. Jean-Louis Thiériot le dit lui-même, Margaret Thatcher a été victime d’elle-même, de son ‘’autoritarisme’’, de sa ‘’suffisance’’ et de son manque de jugement à la fin de son mandat. Elle a réussit à s’aliéner ‘’son propre électorat’’.
Mais tout cela, ce n’est qu’à la fin de son troisième mandat. Car elle a réussi à faire avaler, à l’économie britannique, des remèdes de cheval qui n’ont eu de résultats que ‘’7 ans après’’ son élection. Elle a le temps d’être réélue une première fois avant de guérir plus durablement certains maux du Royaume-Uni. Mais tout n’était pas rose n’on plus. L’inégalité entre riches et pauvres a augmenté le temps de son mandat, et l’inégalité Nord – pauvre – et Sud – riche - s’est aussi accentué Outre-manche. ‘’Elle assume l’inégalité et la revendique même’’ comme dit l’auteur.
Une idéaliste les pieds sur terre
C’était une idéaliste qui avait trop les pieds sur terre. Fille d’épicier qui s’est hissée au sommet de l’Etat, elle a toujours cru au mérite et à la volonté. Pour elle, n’était pauvre que celui qui ne se donnait pas les moyens de s’en sortir. Cette promotion au mérite seul est la raison principale de son combat acharné contre les syndicats – dont elle a réussi à considérablement réduire l’influence. Si elle a pu se sortir de sa petite ville, pourquoi les autres ne pourraient-ils pas ? Tout simplement parce qu’elle a eu beaucoup de chance. Un mari, Denis Thatcher, qui l’a soutenu et qui lui a permis d’arrêter de travailler en dehors de la politique pour se vouer tout entière à sa ‘mission’. Elle avait aussi une force de travail extraordinaire. Beaucoup ne sont pas bénis avec tant de chance.
Jean-Louis Thiériot rétabli aussi des vérités sur la Dame de der. Elle n’a pas toujours été la reine des euros sceptiques. Elle a d’abord été très favorable à la construction européenne. C’est lorsque celle-ci a menacé la souveraineté de l’Angleterre qu’elle s’y est opposée avec un acharnement légendaire. Mais comme le dit l’auteur, elle n’a rien fait de pire que de Gaulle sur ce point. On retrouve, dans le livre, beaucoup de brides de réalité archi connues, que les pages éclairent et expliquent au fur à mesure avec une pédagogie savamment distillée.
Mme la Reine Vs Mme la Premier ministre
On apprend même certaines anecdotes, notamment sur ses rapports avec la famille royale qui n’étaient pas toujours au beau fixe. On aurait pu croire qu’une femme chef de gouvernement aurait pu s’entendre avec une femme chef de l’Etat. Mais Margaret Thatcher ne comprenait pas cet amour des plaisirs de la campagne que la famille royale chérit tant. Mais elle n’a jamais attaqué la Monarchie cependant. C’est une Institution qui fait la grandeur du Royaume-Uni et qu’il faut préserver à tout prix.
Mais le fait d’être deux femmes au pouvoir, n’avait rien pour attendrir le cœur de Margaret Thatcher. Elle n’a jamais été ‘’féministe’’, comme l’auteur s’attache à le montrer. La place de la femme était d’abord ‘’dans son foyer’’, c’était le pilier du quotidien. Un quotidien qui favorise l’élévation sociale par le travail pour ceux qui bénéficient de cette aide féminine. Elle n’a jamais été pour la discrimination positive non plus. Pour la Dame de fer, tout s’obtient par le travail, tout s’arrache à la sueur du front. Rien n’est donné gratuitement. Et elle a effectivement participé à la création de ‘’l’esprit d’entreprise’’ anglais. Elle a du même coup contribué à effacer le côté gentleman des Anglais pour les insérer dans une modernité capitaliste qui fait moins de place à l’apparence.
Le monde selon Thatcher
A en croire Jean-Louis Thiériot, le monde entier à continuer à être ou peut-être même est-il devenu Thatchérien après son départ du 10 Downing Street : ‘’les fameux critères de Maastricht (…) la réglementation de la concurrence, les négociations avec l’OMC, la politique de la BCE en matière monétaire qui permet de contenir l’inflation, tout cela c’est du thatchérisme’’, écrit-il.
L’auteur n’est pourtant pas un Thatcher-lover aveugle. On l’a vu, il reste critique – même si certains de ses commentaires tel ‘‘comme autant de Soviets autoproclamés’’ en parlant des syndicats, laissent penser qu’il n’est pas non plus sans pencher dans un sens. Et lorsqu’il s’agit de décrire la fin de Margaret Thatcher en tant que Premier ministre, il ne se cache pas derrière son petit doigt et explique clairement, et le plus objectivement possible, les raisons de son déclin, on l’a vu.
Pour tous les curieux de la Dame de Fer et pour tous ceux qui veulent comprendre le débat politique d’aujourd’hui, ce livre est un outil très utile.
Lundi, The Independent titrait sur la fin d’une nation de propriétaires. C’est bien Margaret Thatcher qui a créé ce concept en vendant les logements sociaux à leurs occupants. On parle dans tous les sens du NHS. Pour le pire ou pour le meilleur, elle a contribué à insérer cette dose de privatisation que la coalition entend aujourd’hui poursuivre.
‘’Margaret Thatcher’’ est le genre de livre d’histoire qu’on lit pour comprendre aujourd’hui. Et si on le doit en partie à son auteur, on le doit surtout à Margaret Thatcher elle-même qui, quoi qu’on en pense et, là encore, pour le pire ou le meilleur, a réellement bouleversé le Royaume-Uni.
Marie.billon@gmail.com
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