COMPARAISON N'EST PAS RAISON : Le concombre tueur !

Chronique du 7 juin 2011. La parano autour du concombre espagnol aura occupé les premières semaines de l'été. Les Français comme les Anglais n'ont pas été épargnés par l'ambiance délétère.

 

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Comparaisonnestpasraison07 by fromparistolondon

 

 

On l’appelle le ‘’concombre tueur’’. Et attendez, ça sonne encore mieux en anglais, ‘’the killer cucumber’’.


On a beau savoir que le cucurbitacé n’est pas l’assassin d’une vingtaine de personnes, la formule est trop bonne. Le Sun, tabloïd qui aime à se vautrer dans les titres à sensation, préfère continuer à titrer, entre guillemets, '‘The killer cucumber’’ au lieu de se contenter de ‘’E. coli outbreak’’, nettement moins sexy, je vous l'accorde.

 

En France, Libération a, dès le 1er juin, rappelé que ce pauvre concombre était ‘’présumé innocent’’. Sans la photo d’un concombre géant à côté, on aurait pu croire que le quotidien parlait de DSK, lui aussi sur la couverture.

 

Même si la bactérie peut être mortelle, des deux côtés de la Manche, on réussit quand même à en plaisanter. Dans un dessin pseud-humoristique, The Independent propose à la coalition de changer ses méthodes en Libye : puisque les bombardements ne produisent pas les effets escomptés, envoyons à Kadhafi des concombres espagnols.

 

Et puis, les Français ne manquent pas d’humour non plus; sur un marché, un vendeur de primeurs crie à tout va qu’il vend ses concombres avec une assurance-vie.

 

On a aussi remarqué que l’épisode du ‘’concombre tueur’’ a éclipsé le rapport de l’OMS sur la dangerosité des téléphones portables. Un journaliste de RTL a donc envoyé ce message d’alerte : ‘’Si vous voyez un ami téléphoner avec un concombre, c’est un suicide’’.

 

On a beau en rigoler, on en mène pas large. Des deux côtés de la Manche, les ventes de concombres ont baissé de façon spectaculaire. Et les agriculteurs locaux, notamment l’Association des cultivateurs de concombres britanniques en profite pour faire la publicité des produits qui poussent au Royaume-Uni.


Même son de cloche de l’autre côté des eaux avec - prenez votre élan - l'Association d'organisations de producteurs nationaux - tomates et concombres de France, rien que l'appelation est indigeste...

 

Bref, pas de Blitz attitude, pas de ‘’nous continuerons à manger de la viande’’ comme pendant la crise de la vache folle. Les Anglais n’ont pas exercé leur flegme ancestral et ils en ont même oublié les dégâts causés à leur agriculture par l'interdiction de l'exportation de la viande britannique entre 1996 et 2006.

 

Il faut dire que la presse ne les a pas toujours aidés. Ainsi le Times, dans un éditorial, se demande qui des deux est le plus meurtrier : ‘’Cukes or nukes ?’’, les concombres ou le nucléaire.

 

Pour l’éditorialiste, la réponse est claire : ‘’la bactérie E.Coli a tué plus que le nucléaire ne le fera jamais’’. C’est une attaque en règle contre l’Allemagne qui a décidé de sortir du nucléaire pour raison de sécurité.

 

Les Français aussi s’essaient aux bons mots, comme Yves Thréard, dans le Figaro, qui commence son édito en écrivant ‘’cette crise du concombre c’est le comble’’. Ou Libération avec "Les Espagnols digèrent mal".

 

Mais puisqu'il faut bien taper sur quelqu'un et qu'on ne peut plus martyriser le cucurbitacé ibérique, Londres et Paris se tournent vers Bruxelles, connue pour ses choux. Ils s'abattent sur l'Europe et sur ses politiques de subventions aux agriculteurs; surtout les Anglais en fait.


On connaît depuis belle lurette leurs réticences face à la Politique Agricole Commune - la PAC - depuis en fait le célébrissime "I want my money back!", ‘’Je veux qu’on me rendre mon argent!’’ claironné par Margaret Thatcher quand elle habitait au 10 Downing Street, dans les années 80.

 

Pourtnat, des deux côtés de la Manche, on est d'accord. Personne ne veut payer pour l'erreur de Berlin, qui a été la première capitale européenne à tirer sur le concombre espagnol.


Maintenant, ce sont même les journaux allemands qui titrent "don’t shoot the cucumber!", ''Ne tirez pas sur le concombre !''.

 

Pied de nez aux peurs, a priori injustifiées, si vous tapez "concombre" sur internet vous trouverez plus de recettes à base de concombres que d'infos sur le vrai faux assassin de l'autre côté des Pyrennées !


Alors pour se détendre pourquoi pas un gin/concombre ? A consommer avec modération bien sûr. Le Gin, pas le concombre.

 

               

 

''Comparaison n’est pas raison'' sur French Radio London, le samedi après 17h30, le mercredi après 20h00 et le vendredi après 13h30 (heures françaises). "Comparaison n'est pas raison", c'est le regard étonné et amusé d'une Parisienne sur l'actualité britannique. Parce qu'essayer de comprendre l'Outre-Manche à travers des codes hexagonaux aboutit souvent à un résultat tiré par les cheveux.

 

marie.billon@gmail.com

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