Lors de sa visite à Londres, François Hollande a été reçu comme le chef d'Etat qu'il est par le Premier ministre et la reine. Mais quelques petites humiliations lui ont été réservées.

On n’aura pas échappé à la photo de classe, le cliché où François Hollande et David Cameron rient aux éclats en se regardant d’un air complice, voire même amoureux
C’est a photo-souvenir du premier voyage du président français à Londres
Et comme toutes les photos-souvenirs, on sent les sourires forcés
A penny for your thought comme dissent les Britannique, on aimerait tant savoir ce qu’ils pensent derrière leur dents blanches
Pour François Hollande, on peut tenter sans trop de crainte un : “je vais te le faire bouffer ton tapis rouge”
Pour David Cameron, c’est plus compliqué
Pour l’instant, François Hollande n’a rien dit spécifiquement qui puisse l’énerver
Non, c’est plus François Hollande en général qui a la capacité de lui hérisser le poile
Que les amoureux de l’histoire qui se répète se rassure : ce couple franco-britannique aussi valsera sur je t’aime moi non plus
Mais le journal internet Atlantico a décidé de se poser deux minutes et de se demander calmement : « pourquoi cette obsession de la diplomatie française à vouloir envers et contre tout un couple franco-britannique, alors que ça ne fonctionne pas ? »
Enfin une question mérite qu’on s’y arrête
Le journal parle d’une « obsession française de l’axe franco-britannique », « Une obsession que les Britanniques regarderaient avec un mélange de condescendance et d’incompréhension »
Ca commençait bien mais patatras, on arrive sur les mêmes rangaines : l’axe franco-britannique existe, qu’on le veuille ou non ; la France est le seul pays avec lequel le Royaume-Uni a une frontière avec le tunnel sous la Manche
Bref, on a beau vouloir s’en défaire, Français et Britanniques sont des frères plus ou moins ennemis
Et selon Atlantico, le grand frère c’est bien le Royaume-Uni, la France restant souvent baba devant ce que les British arrivent à faire… ils rêveraient en secret de pouvoir faire en France ce que Thatcher et de Blair ont fait de l’autre côté de la Manche, mais la greffe ne prendrait pas conclu le journal
Tant mieux, non ?
Nous sommes donc condamnés à une diplomatie « confrontationnelle » ou à une entente « discordiale » comme le dit le Guardian
Peut-être, mais le froid hollandais est quand même nettement plus sympathique que le froid sarkozyen
EXTRAIT : "J'apprécie l'humour et surtout l'humour britannique. Je ne me suis pas senti du tout offensé, j'étais très heureux qu'on puisse m'offrir un tapis"
A la place d’Hollande, on aurait bien vu Sarkozy recycler son « tu as perdu une occasion de te taire » après cette allusion au tapis rouge déroulé aux exilés fiscaux français
Mais pas avec le nouveau président !
Et de l’humour, Hollande devait en avoir selon le Daily Telegraph
Petits garnements, les Britanniques se seraient léché les babines en voyant le président français « tomber dans leur piège » quand il a dû passer en revue les troupes des Coldstream Guards
Hollande paraissait effectivement tout petit à côté de ces hommes grands et bien bâtis surmontés de leur chapeau en fourrure
Ce devait être un honneur accordé à l’hôte de la journée, mais non seulement il est apparu comme un « nain » selon la presse britannique, en plus, il a passé en revu les troupes qui ont anéanti un autre nabot français, le plus fameux des nabots français : Napoléon, puisque c’est ce bataillon qui l’a défait à Waterloo et qui a occupé Paris ensuite
Quand Cameron viendra à Paris, il faudra qu’Hollande l’emmène de force sur le tombeau de Napoléon aux Invalides pour égaliser les jeux
Alors que l’Elysée pensaient déjà certainement à la préparation de leur petite vengeance, Cameron a ajouté : « Nous essayons de construire une bonne et forte relation. Nous sommes tous les deux des hommes politiques rationnels, raisonnables et pragmatiques qui veulent le meilleur pour nos pays »
Evidemment, c’est l’English man qui se place comme le beau courtisan, le Froggy lui accepte ce baiser d’amitié en se demandant ce qui va lui tomber dessus ensuite
Comme le traduit le Courrier internationale ; Hollande et Cameron sont donc de « frais amis »…
On espère qu’Hollande, même s’il aime arrondir les angles, n’est pas né de la dernière pluie…
Parce que selon les médias britanniques, il l’est, d’ailleurs son petit surnom est Rain Man
Il paraît que ce n’est pas une insulte à l’intelligence du président et surtout pas une reconnaissance de ses dons en mathématiques…
Non, Hollande a gagné ce sobriquet parce que, depuis son entrée en fonction, dès qu’un événement ou une cérémonie nationale a lieu, il pleut…
On a le droit de penser que les British poussent le bouchon un peu loin, eux qui ont fait exploser le pluviomètre cet été, au point que le Times a fait un édito là-dessus pour crier sa douleur, oubliant toute retenue et tout flegme britannique !
Finalement, le plus habile des politiciens, ce n’est ni Cameron, ni Hollande, c’est la reine
Précisons en passant que les journaux britanniques se sont beaucoup inquiétés de l’absence de Valérie Trieweller, la compagne d’Hollande lors de cette rencontre royale
Beaucoup ont pensé qu’elle ne souffrirait pas la comparaison avec la forte impression qu’avait faite Carla Bruni Sarkozy
En France, on pense plutôt que la première petite amie de France se fait discrète après son twit incongru lors des législatives
Bref, nous disions donc que la reine est la plus fine des politiques, et qu’elle sait manier l’humour anglais avec une dextérité qui ne souffre aucune comparaison
Lors de son entretien avec Hollande, sa Majesté a demandé, en français « il peut toujours ? »
Que faut-il y voir ? La reine a-t-elle, elle aussi, traité le chef d’Etat de Rain Man, ou pointe-t-elle a juste titre que chez elle, il pleut toujours, et que si Hollande a le pouvoir de faire pleuvoir, il est certainement plus anglo-compatible que ces prédécesseurs…
On ne saura pas, on ne saura jamais mais peu importe, car si c’était une manière d’excuser les journalistes tant mieux, et si c’était un pic royal, le président, de toute façon, adoooore l’humour anglais…

Chronique diffusée sur French Radio London, le 18 juillet 2012